Test Blu-ray : Ozu 6 films rares ou inédits (Carlotta)

PaysFrance
EditeurCarlotta
Date de sortie19 mars 2024
Support4 BD-50
RéalisateurYasujiro Ozu
Durée120 min 44 / 93 min 08 / 71 min 26 / 83 min 40 / 112 min 06 / 102 min 54
ZoneB
Format d’image1.37 (sauf Femmes et voyous : 1.33)
LanguesJaponais DTS HD MA 1.0 (sauf Femmes et voyous : Musical DTS HD MA 2.0)
AudiodescriptionNon
Sous-titresFrançais optionnels

Image

Note : 7 sur 10.

Ozu, Ozu, Ozu !

Après la ressortie de 6 films en salles, nommés ici « rares ou inédits » (des termes qu’il convient de détailler), Carlotta exploitent ces films maintenant en Blu-ray dans un coffret quatre disques. Récit d’un propriétaire a été restauré plus tardivement que les films parus dans le coffret-parpaing de l’éditeur, tandis que Les soeurs Munakata est un des très rares films d’Ozu réalisés hors de la Shochiku (ici : pour la Shintoho) et était difficilement visible, tout comme Femmes et voyous et Une femme dans le vent. Le cas d’Il était un père est différent, car le film était déjà disponible mais est proposé ici à travers une nouvelle restauration 4K mais aussi et surtout dans un montage plus long d’environ 6 minutes, via des scènes originellement censurées et retrouvées dans une copie 16mm russe. A noter que pour ces quatre films, peut-être que l’aspect « rare ou inédit » explique pourquoi on se situe techniquement assez à part de ce que nous avait proposé la plupart des restaurations du coffret 10 films restaurés. Enfin, Dernier caprice était paru en Blu-ray chez Carlotta (après la parution du coffret 20 films) mais à partir d’un master HD, là où il est maintenant présenté à partir d’une plus récente restauration 4K. Femmes et voyous, Récit d’un propriétaire et Une femme dans le vent étaient, par ailleurs, très récemment parus en Blu-ray en Angleterre via le BFI, à partir des mêmes restaurations 4K exploitées par Carlotta.

Pour les détails de ces restaurations 4K d’ailleurs : Femmes et voyous a été restauré en 2022 par Imagica pour Shochiku à partir d’une copie 35mm créée à partir du négatif original 35mm nitrate, Il était un père en 2023 par Imagica pour Shochiku à partir d’une copie 35mm et d’un master positif 16mm, Récit d’un propriétaire en 2023 et Une femme dans le vent en 2022 par Imagica pour Shochiku (pas plus de précisions disponibles), Les soeurs Munakata et Dernier caprice par Tokyo Laboratory pour Toho (idem). A noter que Femmes et voyous est proposé à 20 images par seconde (5 images uniques puis une image répétée), là où l’édition BFI le propose à 24 images par seconde (ce qui explique pourquoi la présentation de Carlotta est 20 minutes plus longue).

Les films sont répartis comme suit : Femmes et voyous sur le 1er Blu-ray, Il était un père et Récit d’un propriétaire sur le 2nd, Une femme dans le vent et Les soeurs Munakata sur le 3ème, et enfin Dernier caprice sur le 4ème.

(Et ce ne sera sûrement pas tout pour l’éditeur, puisque Gosses de Tokyo et le court-métrage documentaire Kagamijishi ont été récemment restaurés.)

Pour ce qui est de Récit d’un propriétaire et Une femme dans le vent, l’image proposée par Carlotta étant rigoureusement identique à celle proposée par le BFI, nous nous permettons de renvoyer à notre test de l’édition britannique au lieu de faire dans la paraphrase.

Pour Femmes et voyous, outre la différence de vitesse de défilement, il est étonnant de constater une très nette différence de contraste entre les deux éditions. L’édition BFI a un contraste bien plus poussé que l’édition Carlotta, et cela joue plutôt en défaveur des Français (même si le résultat britannique ne nous avait paru parfait pour autant). L’image du disque français parait en effet très voilée et grisâtre, avec notamment des noirs bien trop décollés donnant l’impression de regarder le film à travers un papier calque (captures 2 et 3). Tout le reste est par contre strictement identique à ce que propose le BFI.

Comme sur son précédent DVD, et malgré des travaux récents, le rendu visuel d’Il était un père continue d’être fortement limité et très épais, faisant penser à l’image HD de Le fils unique. Cela a le mérite de gagner en naturel, la finesse additionnelle permettant d’avoir un rendu un peu plus argentique, avec une texture plus visible, mais les détails les plus fins peinent à ressortir et la définition reste très contrainte (captures 1, 2 et 6). Reste que le gain est visible ci et là, comme sur les vêtements (capture 7). A l’opposé cependant, d’autres plans souffrent de défauts particuliers (dédoublement – capture 8) tandis que ceux issus de la copie pré-censure sont très abîmés (capture 10). L’étalonnage nous parait, comme pour Femmes et voyous, un peu trop terne et avec des noirs trop décollés, même si le film pousse un peu plus les hautes lumières et permet à l’image de paraître moins immédiatement voilée. Cela aurait tout de même probablement mérité un ajustement. Enfin, le film reste constellé de petits défauts physiques (poussières et petites rayures), tandis que cadre et densité manquent encore de stabilité.

Les soeurs Munakata fait mieux, mais possède des limites assez proches de celles de Récit d’un propriétaire, à savoir une image encore assez fortement abîmée, montrant de gros défauts de stabilité et une netteté très fluctuante. On pourra par ailleurs décemment supposer une dose visible d’atténuation du grain, ce qui se voit parfois sur les visages (capture 1), parfois sur l’ensemble du cadre (captures 2 et 3), mais c’est une atténuation inconstante car de nombreux plans possèdent une granulation plus traditionnelle (captures 7 et 10). Peut mieux faire, donc. Même constat mitigé côté étalonnage, avec une luminosité qui peine à monter, donnant au film une image sombre et grisâtre (captures 1 et 2, typiquement). Difficile de savoir s’il s’agit d’un choix esthétique d’origine, une limite des éléments physiques utilisés ou un parti-pris à la restauration, mais le rendu est là aussi pas totalement convaincant à l’oeil.

Reste enfin Dernier caprice, dont le précédent Blu-ray, tiré d’un master HD plus ancien, nous avait globalement satisfait. On peut dire ici qu’il y a du bon et du moins bon parmi les changements appliqués. Dans les bons points, c’est le gain en finesse et en précision, amenant la présentation du film dans la lignée de celle de Herbes flottantes. La texture argentique est mieux restituée, en ligne avec le flux technique annoncée, et la finesse additionnelle permet une meilleure délinéation des contours et des détails fins (comparaisons 2 et 3), le tout soutenu par un encodage tout à fait capable. Le cadrage est très similaire entre les deux présentations, mais on gagne par ailleurs très légèrement en image dans le cadre sur la gauche (y compris en passant de 1.33 à 1.37) tandis que l’on perd légèrement sur le bord supérieur du cadre. On gagne aussi en stabilité (couleurs et cadre). L’étalonnage est cependant moins immédiatement convaincant, éliminant la palette assez chaude de l’ancienne présentation pour la remplacer par une palette finalement assez proche, là aussi, de celle de Herbes flottantes. Sauf que la palette de Herbes flottantes semblait spécifique au film, son tournage sur Agfacolor et la volonté d’une photographie atténuant les couleurs sauf les rouges. De fait, nous avons du mal à comprendre la différence d’étalonnage entre l’ancienne et la nouvelle présentation, et où le résultat final se situe. La teinte verdâtre et légèrement désaturée qu’a maintenant Dernier caprice pourra ainsi surprendre les habitués d’Ozu, et même si le résultat est moins poussé que sur Herbes flottantes, il se situe clairement à part de celui des autres restaurations 4K/2K parues précédemment (Fleur d’équinoxe, Fin d’automne, Le goût du saké, etc). Heureusement, le travail reste nuancé dans son travail du contraste et de la luminosité, tout comme la préservation d’un rendu assez organique des couleurs malgré ce nouveau choix, mais en l’état, nous préférons l’ancienne colorimétrie. Petite étrangeté aussi : les panneaux lumineux du plan introductif nocturne (comparaison 1) nous semble avoir été artificiellement recréé, notamment au vu de la différence d’aspect des kanjis sur ces panneaux, qui nous parait impossible à assigner aux nouveaux travaux de restauration, ni à un possible usage d’outils numériques traditionnels, ce qui ne laisse pas quinze possibilités.

L’un dans l’autre au final, cela laisse une impression assez mitigée, notamment pour les films en noir et blanc, dont on aura la désagréable impression qu’ils ont pas reçu le même soin que les films en noir et blanc déjà parus.

Notes image : Femmes et voyous : 6.5 / Il était un père : 5.5 / Récit d’un propriétaire : 7.5 / Une femme dans le vent : 7 / Les soeurs Munakata : 6.5 / Dernier caprice : 8

NB : Les captures de Femmes et voyous, Récit d’un propriétaire et Une femme dans le vent sont prises pour permettre la comparaison avec celles de notre test de l’édition BFI. Pour les cinq comparaisons de Dernier caprice, les premières captures sont tirées du coffret, les secondes du Blu-ray Carlotta de 2020.

Son

Note : 6.5 sur 10.

Quelques différences ici par rapport à ce qui est paru en Angleterre, puisque Femmes et voyous est proposé accompagné musicalement par une nouvelle composition de Maud Nelissen, et que Récit d’un propriétaire et Une femme dans le vent ne sont proposés qu’avec leurs nouvelles pistes son « restaurées », là où les Britanniques incluaient aussi des pistes précédentes (et qui s’avéraient plus agréables à l’écoute). Ces deux présentation sonores étant rigoureusement identiques à celles de l’édition britannique (à ceci près qu’elles sont ici en 1.0 contre du 2.0 dual mono chez les Britanniques, et qu’Une femme dans le vent est présenté un peu plus fort chez Carlotta), nous renvoyons ici aussi à notre test de cette dernière. Par ailleurs, si on continue le jeu des 7 différences, la piste son de Dernier caprice est différente de la précédente (quoique pas tant que ça), tout comme pour Il était un père.

Pour Femmes et voyous, le nouvel accompagnement musical de Maud Nelissen au piano, enregistré en 2023, est présenté en 2.0 surround. Comme il s’agit d’un enregistrement avec un instrument unique, il n’y a cependant aucune séparation, mais le son du piano est bien expédié sur l’ensemble des enceintes. Il s’agit d’une partition le plus souvent assez intimiste et posée, mais qui est techniquement, quoiqu’il en soit, très joliment restituée. Le son est propre, clair et rond, avec une dynamique appréciable et sans distorsion.

Pour Il était un père, le constat est mitigé et fait penser à la piste « non restaurée » d’Une femme dans le vent, à savoir une piste aux hautes fréquences certes préservées, mais dont la quantité de défauts physiques reste très importante. Ainsi, le film possède un souffle prononcé et quasi constant donnant l’impression que toute son action se déroule sous la pluie. L’absence de filtrage notable permet cependant aux voix de mieux ressortir derrière ces défauts, et de s’avérer plus claires et plus intelligibles. C’est un chouia plus compliqué pour la musique, mais elle a le mérite de ne pas être trop distordue.

Les soeurs Munakata nous a paru parmi les mieux lotis du coffret, même si cela reste relatif. Si le rendu sonore nous avait paru satisfaisant en salles, c’est moins le cas à la réécoute, où le filtrage des hautes fréquences (à 7 kHz) se fait plus flagrant, amenant le film dans les zones des autres films eux aussi filtrés. Les voix sont affectées, comme la musique, étouffant le son et rendant le tout plus sourd que ça ne le devrait, du fait du filtrage des mediums et des aigus. Cela reste cependant plus agréable que Récit d’un propriétaire et Une femme dans le vent, dont les filtrages ont été bien plus intensifs. Cependant (et heureusement), cela permet au moins d’avoir une piste plutôt propre.

Enfin donc, pour Dernier caprice, il est intéressant de constater que la piste est très proche de celle de 2020, ce qui laisse à penser que soit elles partagent une même source de départ, soit la piste son de 2024 est une version 2.0 de celle de 2020. Malgré là encore un léger affaiblissement des hautes fréquences (une bande autour de 10 kHz a été éliminée), le résultat est meilleur que celui des autres films parlants, plus filtrés et plus sourds (même si le rendu est peut-être très légèrement moins franc qu’il y a 4 ans). Ici, les voix conservent une belle clarté et évitent de sonner de manière trop sourde, tandis que la musique évite une légère saturation audible par endroits sur l’ancienne piste mais plus maintenant. On garde par ailleurs la bonne propreté de la piste de 2020.

Notes son : Femmes et voyous : 8.5 / Il était un père : 6 / Récit d’un propriétaire : 5.5 / Une femme dans le vent : 5 / Les soeurs Munakata : 6.5 / Dernier caprice : 7

Suppléments

Le coffret se présente sous la forme d’un digipack 4-volets dépliant, regroupé avec un livret de 80 pages via un fourreau cartonné rigide. Les suppléments vidéo, mélange de nouveaux bonus et de reprise de bonus existants, sont répartis sur les quatre disques.

Disque 1 :

  • Ozu x Tanaka (22 min 24, 1080p) : nouvel entretien avec Pascal-Alex Vincent sur Femmes et voyous

Disque 2 :

  • Entretien avec Jean-Michel Frodon sur Il était un père (2006, 14 min 12, 1080i upscalé)
  • Rien (2006, 17 min 08, 1080i upscalé) : analyse d’Il était un père par Jean Douchet
  • Figures : 4 montages d’images récurrentes du cinéma d’Ozu : Affiches et panneaux (9 min 02, 1080i upscalé), Linges, fumées et poteaux électriques (7 min 19, 1080i upscalé), Mers et rivières (6 min 09, 1080i upscalé) et Trains et voitures (10 min 12, 1080i upscalé) (dommage d’ailleurs que ces montages n’aient pas été recréés depuis via les restaurations des films maintenant disponibles)

Disque 3 :

  • Dissemblable (25 min 15, 1080p) : nouvel entretien avec Jean-Michel Frodon sur Les soeurs Munakata

Disque 4 :

  • Préface de Dernier caprice par Pascal-Alex Vincent (2020, 3 min 08, 1080p)
  • Quand la cloche de la jeunesse a sonné (1963, 1h 28min 35, 1080i très très upscalé) : film réalisé par Tsuneo Hatakana et co-scénarisé par Ton Satomu et… Yasujiro Ozu. La qualité de la présentation tient cependant d’un kinescope (le procédé qui consistait à filmer un moniteur vidéo)
  • Bande annonce de la rétrospective 2023 des 6 films (2 min 53, 1080p)

Le livret de 80 pages, quant à lui, est signé Pascal-Alex Vincent, auteur récemment du livre Ozu – Une affaire de famille, et présente en 25 pages de texte les 6 films du coffret, ainsi que plusieurs personnes phares de ces films par rapport à leurs relations avec Ozu : Kinuyo Tanaka, Choko Iida, Shuji Sano, Hideko Takamine et Ganjiro Nakamura.

Matériel de test :

ImagePanasonic TX-PF50G20S
SourceZone B : PS3 Slim 250 Go | Zone A : Panasonic BDT-110
SonYamaha RX-V467
EnceintesKit 5.0 : Jamo S606 | Caisson : Jamo Sub210

Scan disc :

Disque 1 :

Taille Disque34,357,423,381 bytes
Taille Femmes et voyous29,739,875,904 bytes
Encodage VidéoMPEG-4 AVC Video / 29920 kbps / 1080p / 23.976 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Encodage Audio – VOJapanese / DTS-HD Master Audio / 2.0 / 48 kHz / 1335 kbps / 24-bit (DTS Core: 2.0 / 48 kHz / 768 kbps / 24-bit)

Disque 2 :

Taille Disque49,514,285,340 bytes
Taille Il était un père24,254,622,528 bytes
Encodage VidéoMPEG-4 AVC Video / 31941 kbps / 1080p / 23.976 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Encodage Audio – VOJapanese / DTS-HD Master Audio / 1.0 / 48 kHz / 1080 kbps / 24-bit (DTS Core: 1.0 / 48 kHz / 768 kbps / 24-bit)
Taille Récit d’un propriétaire20,274,859,392 bytes
Encodage VidéoMPEG-4 AVC Video / 34922 kbps / 1080p / 23.976 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Encodage Audio – VOJapanese / DTS-HD Master Audio / 1.0 / 48 kHz / 1065 kbps / 24-bit (DTS Core: 1.0 / 48 kHz / 768 kbps / 24-bit)

Disque 3 :

Taille Disque49,728,745,446 bytes
Taille Une femme dans le vent19,131,092,160 bytes
Encodage VidéoMPEG-4 AVC Video / 27965 kbps / 1080p / 23.976 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Encodage Audio – VOJapanese / DTS-HD Master Audio / 1.0 / 48 kHz / 1028 kbps / 24-bit (DTS Core: 1.0 / 48 kHz / 768 kbps / 24-bit)
Taille Les soeurs Munakata28,212,839,808 bytes
Encodage VidéoMPEG-4 AVC Video / 30947 kbps / 1080p / 23.976 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Encodage Audio – VOJapanese / DTS-HD Master Audio / 1.0 / 48 kHz / 1015 kbps / 24-bit (DTS Core: 1.0 / 48 kHz / 768 kbps / 24-bit)

Disque 4 :

Taille Disque39,269,775,633 bytes
Taille Dernier caprice29,084,710,272 bytes
Encodage VidéoMPEG-4 AVC Video / 34864 kbps / 1080p / 23.976 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Encodage Audio – VOJapanese / DTS-HD Master Audio / 1.0 / 48 kHz / 1027 kbps / 24-bit (DTS Core: 1.0 / 48 kHz / 768 kbps / 24-bit)

Captures d’écran HD :

Femmes et voyous :

Il était un père :

Récit d’un propriétaire :

Une femme dans le vent :

Les soeurs Munakata :

Dernier caprice :

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